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La Cité interdite

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les avis de Cinemasie

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43 critiques: 2.84/5



Ghost Dog 3.5 Démonstration de force
Ordell Robbie 0.25 Que de pompiérisme, que d'influence Riefenstahl paresseusement récitée...
Xavier Chanoine 3 L'Empire contre-attaque.
François 3.5 Bon blockbuster avec toutes les limites et les avantages du genre
Aurélien 1.5 Le suicide d'une génération
Tenebres83 1.25
Anel 3
classer par notes | date | rédacteur    longueurs: toutes longueurs moyen et long seulement long seulement


Démonstration de force

Avec La Cité Interdite, la Chine marche clairement sur les plates-bandes Hollywoodiennes et proclame haut et fort qu’il faut désormais compter sur elle pour le divertissement populaire : c’est du gros, c’est du lourd, c’est des superstars et c’est ultra-spectaculaire, avec qui plus est un argument supplémentaire par rapport aux concurrents US, à savoir le poids d’une Histoire millénaire. L’argent a été clairement dépensé en costumes et en décors, dont le foisonnement de couleurs – jusqu’à l’overdose - évoque d’ailleurs plutôt le Cinéma made in Bombay. Sur ce point, certains dénoncent l’épate visuelle exubérante, mais on peut aussi y voir paradoxalement une critique entre les lignes d’un régime près à tous les excès pour régner sur le Royaume et étaler sa puissance. Côté interprétation, rien que du très bon avec en tête un Chow Yun-Fat aussi malicieux que vicieux que l’on a plaisir à revoir dans un film important, et une Gong Li royale qui confirme s’il en était besoin qu’elle est bien l’actrice chinoise la plus incontournable des 20 dernières années. Et si le scénario est classique, il réserve un certain nombre de rebondissements puissants qui se déploient de manière crescendo et donnent lieu à des scènes de guerre à couper le souffle.

Quelques commentaires concernant les polémiques et débats que crée ce film :
- Sur le pompiérisme : la musique est effectivement souvent exagérée, comme s’il fallait multiplier les roulements de tambours et les mettre les basses à fond pour tenter de créer une tension. C’en est parfois fatiguant, même si ce n’est pas un défaut crucial du film.
- Sur le fourvoiement artistique de Zhang Yimou et de Chen Kaige depuis quelques années : on les encense pour avoir remis sur pied le cinéma chinois sur la scène mondiale dans les années 90, et on les vilipende pour leur choix du grand spectacle dans les années 2000. Mais ne peut-on pas y voir une certaine cohérence à vouloir relever le défi d’inscrire la Chine au même rang que les USA et la Corée en terme de cinéma à Grand Spectacle, en laissant le cinéma d’auteur à toute la génération suivante (Lou Ye, Wang Chao, Ning Ying, Wang Xiaoshuai, Jia Zhang Ke…) – même si la liberté d’expression est encore loin d’être acquise ? Qui d’autre aurait pu réaliser un tel film, si ce n’est un metteur en scène expérimenté et mondialement reconnu ? Et au passage, le personnage rebelle de Gong Li est-il si éloigné de celui d’Epouses et Concubines ou de Qiu Ju ?
- Sur la dimension propagandiste et la « morale discutable » du film : j’avoue que j’ai du mal à saisir. La tragédie antique n’était ni moins tendre ni moins cruelle, la soif du pouvoir a toujours existé et les moyens de le conquérir ou de le conserver ont toujours regorgé d’inventivité et d’hémoglobine. Est-ce le grand nettoyage final qui choque, avec tous ces pots de fleurs jaunes qu’on redépose par milliers ? Je le trouve au contraire très réussi, car il m’évoque le nettoyage final similaire du Hara Kiri de Kobayashi, et permet de s’interroger sur le sens de la révolte, du complot et de l’Histoire.

En résumé donc, un film riche et sujet à discussion qu’il faut voir pour se forger sa propre opinion.



19 mars 2007
par Ghost Dog




L'Empire contre-attaque.

L'un des plus gros blockbusters chinois de ces cinq dernières années débarque sur les écrans français. Pas de doute, Zhang Yimou a placé la barre très haut pour ce drame Shakespearien au doux parfum d'Orient. Mais est-ce que le fait de posséder des crédits impressionnants (45 millions de dollars) suffit à pondre un bon film? Car à n'en pas douter, La Cité interdite est un grand film par son ampleur et ses moyens démesurés, où la moindre scène de discussion est prétexte à mettre en avant l'ostentation des décors, leur pouvoir visuel fascinant mais aussi leur incroyable lourdeur. A titre d'exemple, chaque couleur est saturée, chaque tapisserie recèle d'une montagne de détails et de formes géométriques différentes, chaque texture est perceptible allant du verre trouble aux couleurs baveuses, au rideau de bois, à la moquette luxueuse et j'en passe. Une lourdeur qui passera bien chez certains alors qu'elle pourra nuir à l'implication purement émotionnelle du spectateur passant plus son temps les yeux rivés sur les décors et les décolletés plongeants (n'est-ce pas messieurs?) empêchant peut-être à la bonne compréhension des nuances d'interprétation : la folie croissante de Gong Li, personnage aussi redoutable que déstabilisant, la prestance de Chow Yun-Fat à la limite du cabotinage impérial (mais qu'est-ce qu'on l'adore), la grasse de la servante Chan prise au piège dans les filets de l'Empire, le côté héroïque mais emprunt d'une peur constante chez les fils de l'Empereur, etc.

La grande interprétation d'ensemble est à l'image de la grandeur des moyens, et souligne encore d'avantage l'exclusivité de la mise en scène, parfaite, mais une fois de plus trop axée "grand spectacle" voir même carrément "show must go on" pour les séquences de combat entre les deux armées. On pourrait même mettre Freddie Mercury au micro pour soutenir le nombre démentiel de figurants qui s'en mettent plein la tronche, parce que Zhang Yimou cède au spectacle suprême, proche de la pastiche simple du wu xia, et de la parodie grassouillette de Shakespeare. Prise de risque ou simple caprice de "star"? Dernièrement on avait The Banquet qui lui aussi privilégiait l'esthétisation de ses affrontements avant toute chose. Ici c'est encore pire, avec une quantité de ralentis telle que la lisibilité des combats s'en ressent décuplée -bien évidemment- mais l'utilisation quasi permanente d'effets spéciaux bateaux (fausses armes, fausses étincelles, faux sang) finit par écoeurer même si le talent de Tony Ching Siu-Tung n'est pas à remettre en cause : ses chorégraphies sont parfaites. On pourra ceci dit émettre quelques doutes sur le scénario, étrange et parfois de mauvais goût. Chez Shakespeare, les morts ne sont pas drôles. Chez Zhang elles le sont. Cherchez l'erreur. Une erreur qui ne plombe pas La Cité interdite mais une erreur qui l'empêche d'atteindre le rang de film intouchable. Drame de pacotille, pastiche de wu xia, mais mise en scène exemplaire et interprétation sans faille, c'est ce dont on retiendra du film le plus cher de l'histoire du cinéma chinois. Ca ne va pas faire que des heureux.

Esthétique : 4/5 - Elle ne sera pas du goût de tout le monde. En revanche la mise en scène est maîtrisée. Musique : 3/5 - Umebayashi réalise une composition en dents de scie. Epique ou tristement molle. Interprétation : 4.25/5 - Une interprétation digne. Gong Li et Chow Yun-Fat, d'une beauté à couper le souffle. Scénario : 2.5/5 - Classique et intéressant dans son premier tiers. Violent et involontairement drôle dans son dernier.



14 mars 2007
par Xavier Chanoine




Bon blockbuster avec toutes les limites et les avantages du genre

Plus encore que Hero, la Cité Interdite est l'exemple typique du blockbuster dont les excès sont autant de qualités que de défauts. Suite à deux premiers films à gros budgets à succès (Hero donc et Le Secret des Poignards Volants), Zhang Yimou continue de varier sur les mêmes thèmes. Ici il choisit une intrigue de palais mélangée à quelques scènes d'action d'envergure. On peut déjà à ce titre souligner les avantages en terme de rythme. Là où Hero et les Poignards distillaient les scènes d'action très régulièrement, mais sans véritable crescendo, notamment pour le premier, on sent ici monter une véritable tension aboutissant à une vraie grosse scène finale. S'il frustrera les spectateurs cherchant des combats à gogos, le procédé permet de mieux mettre en valeur l'explosion de violence finale.

Auparavant on aura eu droit à des intrigues de palais tout à fait classiques, mais pas moins dépaysantes pour le spectateur occidental moyen. De part le cadre pour commencer, où tout a été fait pour en mettre plein la vue. Vous connaissez la chambre du Roi et de la Reine à Versailles? C'est un modèle de sobriété comparé à ce qui est étalé dans La Cité Interdite. Le film est une véritable démonstration de couleurs pour écran plats, jusqu'à l'overdose. Yimou filme des kilomètres de couloirs décorés comme jamais, des costumes et des armures surchargés, des décors grandioses, bref, il en donne pour son argent. Mais bien sûr de manière complètement impersonnelle, avec une photographie parfaitement neutre. Du blockbuster, rien de plus, rien de moins.

Les acteurs sont comme souvent dans ce genre de films des grands noms. On trouve heureusement beaucoup de bon et un peu de mauvais. La fausse note est comme on l'attendait Jay Chou dont le regard d'endive à moitié cuite fait vraiment tâche au milieu du casting de monstres. Il n'est pas désastreux, il n'a heureusement pas le rôle principal, mais il n'est tout simplement pas au niveau. Car autour de lui, c'est le choc entre deux générations du cinéma chinois, Gong Li incroyable en impératrice au bord de la folie et un énorme Liu Ye en premier fils de l'empereur. Chow Yun-Fat complète de manière fort convaincante la famille, même s'il lui manque une lichette de classe traditionnelle à la chinoise qu'avait par exemple un Chen Dao-Ming dans Hero. Ces trois là en font évidemment des tonnes. Chaque regard porte une émotion intense, chaque mot de chaque dialogue est pesé pour appuyer les antagonismes entre les personnages, chaque geste est lourd de conséquences. Et comme le film ne manque aucunement de grands moments dramatiques (c'est la Cité Interdite quand même, pas Oui oui va à la plage!), on a droit à un grand numéro d'acteurs, certes pas vraiment dans la finesse, mais grand numéro quand même.

Les scènes d'action sont par contre un poil décevant. Hero avait déjà inauguré des scènes d'envergure à milliers de figurants, La Cité Interdite tente d'aller encore plus loin avec une scène de bataille encore plus ample, lorgnant ouvertement vers le Seigneur des Anneaux. Et là il n'est plus tellement question de chorégraphies, mais plutôt d'ordinateurs. Les chinois étant en retard à ce niveau, la qualité n'est pas optimale et risque de décevoir, spécialement en salles. Surtout que cette scène finale qu'on attend tout au long du film manque un peu de longueur et surtout d'un habillage épique trahi par une musique complètement transparente. Ching Siu-Tung est donc très peu utilisé, sauf lors de quelques scènes mettant en scène des tueurs volants "à la ninja" tout de suite beaucoup plus funs. Mais il est évident que les fans d'arts martiaux n'auront pas grand chose à se mettre sous la dent ici.

Au final on obtient donc un film sans aucune surprise. Tout est fait pour "vendre" la Chine ancienne, pour étaler à la face des spectateurs occidentaux ébahis la Cité Interdite, ses costumes, ses armures, ses armées, et bien sûr sa politique nationaliste de beaucoup qualifieront immédiatement à raison de propagandiste. A la manière de n'importe quel blockbuster (chinois, coréen, japonais ou américain) finalement. D'un autre côté les moyens permettent de mettre en scène des histoires que le cinéma chinois n'a jamais pu nous montrer jusqu'alors, et d'embaucher des acteurs de renom qui s'ils ne délivrent pas de performances en finesse, en donnent tout de même largement pour leur argent aux spectateurs. Conseillé alors? Aux allergiques à Hero, aux Poignards et autre blockbusters ultra balisés, évidemment non. Aux autres oui, le côté intrigue de palais + grosse scène d'action reste dépaysant pour le spectateur occidental, même initié.

13 mars 2007
par François




Le suicide d'une génération

Si La Cité Interdite, malgré ses couleurs ridiculement clinquantes et ses plans poseurs à l'extrême, se maintient à un niveau très correct pendant la première heure, Zhang Yimou ne parvient toutefois pas à contenir plus longtemps ses élans stylistiques les plus vulgaires et laisse finalement son film sombrer dans le ridicule avant de l'achever en nous assénant une conclusion absolument puante.

Après Hero et Le Secret des Poignards Volants, Zhang Yimou semble, comme Chen Kaige, renoncer peu à peu à toute ambition artistique.

Ceux qui ont réinventé le cinéma chinois dans les années 80 ne semblent en effet plus être aujourd'hui que des faiseurs d'images au service d'une vaste stratégie de communication qui relève finalement presque de la propagande. On en oublierait presque que Chen Kaige et Zhang Yimou, tous deux issus de la première promotion de l'Académie du Cinéma de Pékin (1982), n'ont eu de cesse, pendant plus de dix ans, de redonner ses lettres de noblesse à un cinéma chinois en ruines au sortir de la Révolution Culturelle.

La propention qu'ont les deux chefs de file de la cinquième génération à sombrer dans un cinéma commercial des plus artificiels doit, au-delà de l'indispensable discours critique, soulever des questions quant aux mutations actuelles du cinéma chinois.

Rappelons au passage que des auteurs particulièrement talentueux sont, eux, régulièrement interdits de tournage en Chine.



13 mars 2007
par Aurélien


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